La force d’être soi
Parfois pour faire changer les choses, être soi, c’est déjà beaucoup.
J’ai dernièrement vécu une longue période où j’ai eu à faire face au syndrome d’imposteur. Vous savez, ce sentiment d’imposture qui vous fait remettre en question vos succès et vos réalisations. Et bien cet état d’être s’est rapidement manifesté lors de ma participation au Fellowship en inclusion et philanthropie de l’AFP (Association of Fundraising Profesionnals).
Voyez-vous, je fais bel et bien partie de ce que nous pouvons catégoriser de « diversité ». Je réponds à deux critères, soit le handicap et l’orientation sexuelle. Deux critères qui n’ont rien de bien particulier dans mon quotidien. Deux critères qui ne m’ostracisent pas, ne me limitent pas dans ma carrière et ne m’apportent aucun ennui/malheur/préjudice/etc.
Alors, lorsque j’ai rencontré les autres participants du programme de l’AFP, le choc fut brutal. Je comprenais, en un simple coup d’œil les raisons expliquant la sélection des autres membres. Parmi le groupe, il y avait plusieurs femmes, une personne en fauteuil roulant et évidemment, plusieurs membres de différentes communautés ethniques et culturelles. Moi, je ne me voyais que comme simple (et privilégié) homme blanc parmi toutes ces personnes qui avaient certainement eu à mettre les bouchées doubles pour arrivées où elles sont.
Tout en vivant ce syndrome d’imposteur, j’ai eu à être témoin de fortes discussions entre un formateur et un participant sur des enjeux raciaux à Toronto – un sujet à 1000 lieux de ma réalité. Déjà, je ne m’identifiais pas au groupe au départ, désormais j’avais la nette impression que cette formation ne s’adressait en rien à moi. Avec le recul, ma vision est plus nuancée et je crois qu’en fait, elle s’adressait tout spécialement à moi, justement pour me « sortir » de ma perception de la diversité.
Durant cette formation, j’ai pu parler à différents participants et à des gens dans mon réseau qui m’ont confirmé ma légitimité d’avoir une voix au sein des discussions visant l’inclusion. D’ailleurs, tout le monde en a une.
Je n’ai peut-être pas l’âme d’un « militant », mais j’incarne tout de même qui je suis 24h/24. Le simple fait de vivre en société, de vivre sans gêne et sans frein ma vie, avec mon mari et mon fils et bien, tout ça contribue à déboulonner un par un les mythes liés aux personnes en situation de handicap ainsi qu’à la communauté LGBTQ2+. Mais à la lumière des situations systémiques et répétées qui freinent l’inclusion, n’aies-je pas le devoir d’en faire plus? Rester dans ma position de confort ne fait-il pas de moi un obstacle plutôt qu’un allié à diversité?
Je demeure convaincu que parfois, être soi, est le meilleur levier pour changer les perceptions. Mais ce ne sera jamais suffisant.
Daniel H. Lanteigne est directeur général de la Fondation RÉA et boursier du Programme de bourse en inclusion et philanthropie d’AFP Canada (2018-2019). linkedin.com/in/dhlanteigne/